Les intercommunalités viennent de connaître plusieurs bouleversements dans leur fonctionnement. La loi NOTRe a changé leurs périmètres tant géographiques qu’en terme de compétences. Les élus, les agents, les organigrammes et…

Les intercommunalités viennent de connaître plusieurs bouleversements dans leur fonctionnement. La loi NOTRe a changé leurs périmètres tant géographiques qu’en terme de compétences. Les élus, les agents, les organigrammes et les bureaux ont évolués. Dans ce marasme, pourtant obligatoire pour faire évoluer un territoire, certains élus ne s’y retrouvent pas. Nous avons donc lancé un appel à témoignage national concernant ces changements. Le résultat est sans appel.

Les intercommunalités non représentatives des citoyens

Premier constat, 77% des élus répondant nous indiquent considérer que les EPCI ne sont pas représentatives des citoyens. Du côté des citoyens, ils sont 75% à penser être mal représentés. Pourquoi ?
D’abord, les élus qui ont répondu, déplorent un manque de représentativité des catégories sociaux professionnelles. Une description assez fidèle des assemblées intercommunales nous a même été livrée : “principalement des élus mâles, blancs, aux tempes grisonnantes…”. Car ce qu’il manque aux EPCI ce sont des élus qui s’engagent dans les collectivités et qui ne sont pas tous retraités. La raison ? L’un des interrogés l’aborde sans détour “la majorité sont retraités, faute de statut de l’élu suffisamment protecteur”. Pour s’engager il faut du temps, des ressources, de l’audace et malheureusement, selon les parcours de vie, tout le monde n’en dispose pas à sa guise. Le statut de l’élu une réponse entière ? Rien n’est moins sûr mais il est certain qu’il est un des éléments de réponse à apporter.

Deuxième élément abordé : une élection au suffrage indirect. En effet, les représentants des communes siègent grâce à une élection organisée lors d’un conseil municipal. Ce sont les élus municipaux qui désignent ceux qui siégeront également dans l’EPCI. Une meilleure représentativité permettrait aux citoyens de choisir directement les élus qui les représenteront. Certains dénoncent des “élections faussées”. Au delà d’une élection indirecte, des témoignages abordent la question du “projet à l’échelle de l’agglomération” regrettant d’observer des conseillers qui ne siègent uniquement que pour “défendre leurs pré carré” et s’engager “dans une guerre de clochers”. L’association de l’élection au suffrage directe pour les intercommunalités et du projet de territoire semble rapidement examinée. Les citoyens ayant répondu à notre concertation demandent d’ailleurs aux élus de mieux “étudier le territoire et de le représenter de façon aussi pragmatique que possible”. Ils aimeraient aussi que les conseillers communautaires “[s’écoutent] pour avancer ensemble”. Une image très peu valorisante pour les représentants des communes dans ces conseils.

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Un troisième élément se détache nettement. La représentativité des petites communes est beaucoup trop faible. Comment peser dans le débat quand un seul élu siège au milieu d’une grande assemblée ? Ici aussi les élus sont déçus des mesures mises en place, certains se retrouvant noyés dans un territoire ne ressemblant pas à leurs problématiques. “Des représentations différentes selon la taille des communes. 1 représentant par commune jusqu’à 8000 habitants, soit quelques centaines d’habitants pour 1 élu jusqu’à 8000 habitants pour 1 élu aussi”. Et la question de la représentations des élus de l’opposition reste en suspens : est-il justifié de ne pas voir siéger des élus ? Pourtant, de nombreux citoyens demandent une réduction du nombre d’élus en France. Il va falloir choisir.

La parité mis à mal

Ce n’est pas une exclusivité, la parité dans les intercommunalités n’est pas la mieux servie. Le nombre de représentants étant, pour beaucoup, à la baisse, les femmes élues se sont vue s’éloigner des instances communautaires. La représentation est la plus basse est encore au sein des bureaux exécutifs. 95% des réponses présentant leur bureau sont sans appel : la parité n’est pas représentée dans l’exécutif. Pourquoi ? Les maires étant majoritairement des hommes et des présidents ou vices-présidents, mécaniquement, cet effet se traduit dans les EPCI. Cependant, aucun texte n’oblige un-e Président-e ou Vice-Président-e à être maire. Certains maires expliquent leur siège comme un lien direct entre la commune et l’intercommunalité. Suffisant pour expliquer ce manque terrible de parité ? Nous n’en sommes pas sûrs.

“La population est composée de 50% de femmes et dans mon EPCI, elles ne sont que moins de 10%”

L’absence de femmes au sein des présidences et vice-présidences oriente la politique générale – d’un territoire qui gagne grandement en compétence – sur des décisions qui oublient les 50% de la population. Au delà du manque de représentation, la distribution des délégations est, elle aussi, très stéréotypée. Comme souvent, les femmes héritent des compétences sociales, éducation, jeunesse, “et au mieux environnement” comme on nous le précise. “Une équipe composée d’hommes avec, pour certains, un imaginaire du rôle de la femme, peut entraver à se présenter à de telles fonctions”, car les femmes ont finalement plus de bâtons dans les roues que ce qu’on imagine. Et ce schéma qui se déroule de mandat en mandat en décourage certaines élues locales.
Le cumul des mandats entre Maires et Vices-Présidents, qui entraîne “des conflits de pouvoirs regrettables”, éloignent les femmes.

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Les intercommunalités : un lieu d’avenir

Pourtant, les intercommunalités s’inscrivent dans une dynamique ancrée dans le futur. Gain en compétence, fusion pour une plus forte place dans les territoires, nul n’est censé ignoré que leur organisation est décisive pour l’avenir. Certains retours témoignent de “la faible mobilisation de la société civile” et de lieux de débat “opaques et sans mobilisation citoyenne”. 

Nous avons alors questionné les élus sur l’avenir des intercommunalités, et au sein d’une réponse ouverte, de grands axes se sont démarqués :

  • L’obligation de la parité semble inévitable dans 49% des réponses
  • Le suffrage direct arrive en deuxième position avec 23.5 % des réponses qui l’abordent

Elus et citoyens veulent donc des lieux de débats représentatifs, engagés pour le bien commun et élus directement par les habitants. Ce serait une nouvelle révolution pour des assemblées qui n’ont pas été remises en question depuis leur création.

Des idées audacieuses et originales ont aussi été présentées :

  • “Impliquer les jeunes dans la vie citoyenne grâce aux EPCI”
  • “Que les maires ne soient pas vices-présidents”
  • “Instaurer des réunions tripartites avec les élus, les professionnels et les associations du territoire”
  • “Obligation de présenter la 1ere adjointe – lorsque le maire est un homme et inversement – à la présidence ou vice-présidence de l’intercommunalité”
  • “Présenter des binômes paritaires élus pour représenter les communes dans les EPCI”

Si l’avenir des territoires passe par les intercommunalités, ces dernières doivent changer. C’est le message qui transpire des réponses qui ont été collectées. Un futur est encore à écrire et, nous l’espérons, les futures élections feront changer la représentation dans les EPCI. Affaire à suivre.